le forum de julos

Forum créé le 15/10/2003 12:08

Obtenez 1000 visiteurs rapidement !
Obtenez 1000 visiteurs rapidement !
Outils webmasters Compteur Chat Forum Sondage Découverte Référeur


M'inscrire M'inscrire Me connecter Me connecter Mot de passe oublié Mot de passe oublié Retour au forum Retour au forum



  Pages: 1
Poster un nouveau message Répondre au message
Auteur Message
   Trier par date décroissante
aurelie
Posté le:
3/2/2008 19:29
Sujet du message:
Namasté a gagné!!!!!
Répondre            
Site Internet:
http://Parfum-d-edelweiss.over-blog.com/
Namasté a remporté haut la main le concours de littérature.
Il a eu les quatre premiers prix.
Je vous offre, avec son autorisation, mon préféré: Le passage.

Soudain vous voilà perdu, comme au réveil parfois quand tout s’est effacé. Vous cherchez à reconnaître l’obscurité qui vous entoure, mais rien ne vous rassure, ni cette oppressante sensation de confinement, ni ces odeurs inhabituelles (des odeurs de feu de bois, d’herbes brûlées, des odeurs fortes de vie sauvage, de terre). Par la rosace ouverte sur le ciel que forme un enchevêtrement de perches polies, un trait de lumière tombe à travers la fumée. Alors seulement vous la voyez. C’est une jeune femme, brune, avec de petits yeux effilés noirs et les pommettes hautes, la peau cuivrée, les cheveux serrés en longues tresses luisantes. Une Indienne (une squaw, comme on disait autrefois dans les westerns du dimanche). Vous la regardez, son visage est grave et tranquille, toute votre attention est posée sur elle, elle en revanche semble ignorer votre présence et pourtant, vous êtes là. Vous cherchez à comprendre pourquoi et comment ce peut être possible et quel est le rapport entre votre vie et tout cela, mais très vite ces questions disparaissent. Vous n’êtes plus qu’un œil qui voit, un témoin qui observe, un nez, une oreille. Un peu en retrait dans l’ombre derrière elle, la dépouille d’un ours à collier, maintenue par des lanières de cuir dans une position un peu théâtrale, montre ses crocs puissants et jaunes, curieusement cette vision ne vous effraie pas (sans doute s’agit-il d’un rêve).
Elle est assise sur une fourrure épaisse et sombre, devant un foyer de pierres plates noircies par la suie. Il perle de son front quelques gouttes de sueur. Elle chante en se balançant légèrement et ses yeux se ferment (son chant murmuré ressemble à une offrande, une prière).
Par intervalles réguliers, elle tire d’un petit sac orné de broderies, une pincée de sauge sèche qu’elle éparpille sur les braises. D’un geste souple et lent, elle dirige alors la fumée de cet encens vers son visage et achève son mouvement en posant sa main sur son ventre rond. Car l’enfant qu’elle porte arrive et c’est pour lui qu’elle chante.
Elle est avec lui, elle le guette, elle sait que bientôt, ils seront tous les deux emportés dans un galop sauvage. Soutenue dans sa pensée par les générations de celles qui l’ont précédée, elle attend sans frayeur l’épreuve initiatique qui la fera entrer dans le cercle des mères, l’instant magique où la vie surgira dans un chaos de douleurs et de sang.
Elle chante à voix basse une mélopée grave et douce, un peu gutturale, dont le rythme semble s’accorder à celui de vos pulsations cardiaques.
Et tout en l’écoutant, vous avez peu à peu le sentiment étrange que c’est aussi pour vous qu’elle chante. Cette voix rauque vous remue les tripes, elle vous happe, elle vous envahit. Alors même que vous semblez ne pas exister pour elle, cette femme en une mystérieuse transcendance vous accueille et vous intègre à son univers. Ou plutôt est-ce vous qui disparaissez dans le sien, vous qui mourez à tout ce que vous imaginiez être encore jusque là, pour n’être plus que cet instant.
Un passage secret se creuse entre elle et vous dans l’espace et le temps. Le rythme lancinant de l’incantation vibre dans votre corps et pénètre votre être. Voilà que le monde intérieur de cette femme se déverse en vous, que sa vie s’ouvre comme un livre. Voilà que ce chant délivre, dans le profond de vos cellules, des mémoires enfouies, des siècles oubliés. Vous savez qui elle est, vous l’avez reconnue, votre cœur se souvient. Vous étiez là, dans la pénombre enfumée du tipi. C’était il y a longtemps.
Soudain, vous sortiez de son ventre.

©Namasté
 

Poster un nouveau message Répondre au message
  Pages: 1

M'inscrire M'inscrire Me connecter Me connecter Mot de passe oublié Mot de passe oublié Retour au forum Retour au forum