Ce soir, malgré le temps qui a usé les dents de la peine autant que le vent les Vosges, ce soir, il fait froid en en dedans du monde. Ce soir, c’est la tristesse qui danse, et je grille rageur ma cigarette au coin des souvenirs que n’ai pas vécus, d’une voix enfermée dans un répondeur qui ne répond plus. Ce soir, c’est le débordement de la peine de Julos, Boris et Bruno qui m’atteint à mon tour, après des années d’approches et d’aiguisements, d’aiguillages subtils. Ce soir, alors, je vais me demander encore d’où vient ce chant qui monte au-delà des ronces, au-delà des gerçures et des douleurs qui, bouche bée, nous cueillent d’un coup de serpette. Ce soir, ensuite, je me laisserai porter jusqu’au syrinx de ce chant. Et demain, même endolori, chantera. « Plus fort que la mort est l’amour ».
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