Un après midi froid de décembre dans un pré. Trois femmes d’âge mur sont en génuflexion dans la boue, chacune d’elles cachée derrière un tas de pneus. Celle du milieu bat des bras, confuse et prise dans un tir de balles qui ont éclaboussés son masque et ses lunettes protectrices de milliers de pellicules jaunes. Trois mercenaires en tenue de combat contrôlent les échanges et crient des instructions que personne ne respecte parce que personne ne les entend.
Les quatorze enfants tirent en l’air, par terre, sur les pneus, vaguement dans la direction des mercenaires et un peu les uns vers les autres mais ils rient tellement que, même s’ils savaient viser, ils se rateraient de dix pas.
Quand la mamie avait demandé si nous pouvions l’aider, ni elle ni nous ne savions ce que sa petite fille choisirait pour fêter son treizième anniversaire. Nous nous étions imaginées un petit disco, le cinéma, ou le patinage, peut être. Mais pas une partie de paintballing ! (en français, comment s’appelle ce ‘sport’ ?) Quelle horreur ! Je m’imaginais le pire. Et bien non : au début, deux des enfants avaient pris le jeu très au sérieux mais les autres ont eu vite fait de saboter le combat de billes gélatineuses. Au bout de quatre minutes, il ne leur restait plus de boulettes, les lanceurs vides étaient abandonnés et, comme s’ils avaient trois ans et pas treize, les enfants s’amusaient à répandre la peinture sur les vêtements des autres. Le jeu permettait aux jeunes adolescents de toucher avec un peu plus d’audace que d’habitude le visage des autres.
Les organisateurs blasés se préparaient à la supervision du groupe suivant : un bus rempli de jeunes femmes qui avaient choisi l’endroit pour enterrer la vie de jeune fille de l’une d’elle. |