le forum de julos

Forum créé le 15/10/2003 12:08

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Auteur Message
   Trier par date croissante
Jilber
France
Posté le:
10/6/2007 10:10
Sujet du message:
RE: Extrait de mon livre préféré...
Répondre            
Site Internet:
http://jilber.fr

Puisque personne ne me l'a demandé c'est que vous aviez tous reconnnu un extrait du Grand Meaulnes d'Alain-Fournier...
 

jenofa
France
Posté le:
8/6/2007 23:48
Sujet du message:
Mon grain de sel Gionesque
Répondre            
Email:
verts.pb@free.fr
 

"Tu te souviens, dit Bobi, de la grande nuit ? Elle fermait la terre sur tous les bords.
Je me souviens.
Alors je t’ai dit : regarde là-haut, Orion-fleur de carotte, un petit paquet d’étoiles. Jourdan ne répondit pas. Il regarda Jacquou, et Randoulet, et Carle. Ils écoutaient.
Et si je t’avais dit Orion tout seul, dit Bobi, tu aurais vu les étoiles, pas plus, et, des étoiles ça n’était pas la première fois que tu en voyais, et ça n’avait pas guéri les lépreux cependant. Et si je t’avais dit : fleur de carotte tout seul, tu aurais vu seulement la fleur de carotte comme tu l’avais déjà vue mille fois sans résultat. Mais je t’ai dit : Orion-fleur de carotte, et d’abord tu m’as demandé : pardon ? pour que je répète, et je l’ai répété. Alors, tu as vu cette fleur de carotte dans le ciel et le ciel a été fleuri.
Je me souviens, dit Jourdan, à voix basse.
Et tu étais déjà un peu guéri, dis la vérité.
Oui, dit Jourdan. Bobi laissa le silence s’allonger. Il voulait voir. Tout le monde écoutait. Personne n’avait envie de parler.
De cet Orion-fleur de carotte, dit Bobi, je suis le propriétaire. Si je ne le dis pas, personne ne voit ; si je le dis tout le monde voit. Si je ne le dis pas je le garde. Si je le dis je le donne. Qu’est-ce qui vaut mieux ? Jourdan regarda droit devant lui sans répondre.
Le monde se trompe, dit Bobi. Vous croyez que c’est ce que vous gardez qui vous fait riche. On vous l’a dit. Moi je vous dis que c’est ce que vous donnez qui vous fait riche. Qu’est-ce que j’ai moi, regardez-moi. Il se dressa. Il se fit voir. Il n’avait rien. Rien que son maillot et, dessous, sa peau. Il releva ses grands bras, agita ses longues mains vides. Rien. Rien que ses bras et ses mains.
Vous n’avez pas d’autre grange que cette grange-là, dit-il en frappant la poitrine. Tout ce que vous entassez hors de votre cœur est perdu."

Extrait de : Que ma Joie Demeure, 1935, Ed. Grasset.





----- Message d'origine -----
-----------------
dimanche lourd couvercle sur le bouillonnement du sang
hebdomadaire poids accroupi sur mes muscles
tombé à l'intérieur de soi-même retrouvé
les cloches sonnent sans raison et nous aussi
sonnez cloches sans raison et nous aussi
nous nous réjouirons au bruit des chaînes
que nous ferons sonner en nous avec les cloches
*
quel est ce langage qui nous fouette et nous sursautons dans la lumière
nos nerfs sont des fouets entre les mains du temps
et le doute vient avec une seule aile incolore
se vissant se comprimant s'écrasant en nous
comme le papier froissé de l'emballage défait
cadeau d'un autre âge aux glissements de poison d'amertume
es cloches sonnent sans raison et nous aussi
les yeux des fruits nous regardent attentivement

(…)

Tristant Tzara, l'homme approximatif.
 

babel
Posté le:
8/6/2007 19:30
Sujet du message:
la une de l'un des mes livres préférés
Répondre            
Email:
babel@etoiles.net
 
-----------------
dimanche lourd couvercle sur le bouillonnement du sang
hebdomadaire poids accroupi sur mes muscles
tombé à l'intérieur de soi-même retrouvé
les cloches sonnent sans raison et nous aussi
sonnez cloches sans raison et nous aussi
nous nous réjouirons au bruit des chaînes
que nous ferons sonner en nous avec les cloches
*
quel est ce langage qui nous fouette et nous sursautons dans la lumière
nos nerfs sont des fouets entre les mains du temps
et le doute vient avec une seule aile incolore
se vissant se comprimant s'écrasant en nous
comme le papier froissé de l'emballage défait
cadeau d'un autre âge aux glissements de poison d'amertume
es cloches sonnent sans raison et nous aussi
les yeux des fruits nous regardent attentivement

(…)

Tristant Tzara, l'homme approximatif.
 

Agnès
Royaume-Uni
Posté le:
8/6/2007 11:50
Sujet du message:
L'herbe à brûler
Répondre            
Email:
zen23512@zen.co.uk
 
La première page de mon livre préféré.

" Quand mon âme a quitté mon corps elle a d’abord volé vers le fuchsia sur la sellette près du lit. De nombreuses plantes décoraient ma chambre. Ma mère en raffolait. Chaque année elle faisait de nouvelles boutures. Elle achetait des pots, les rangeait sur les appuis des fenêtres, l’armoire, le couvercle de la machine à coudre. Elle en garnissait également la table et quelquefois les chaises, ce qui gênait les visiteurs. Elle en disposait dans le corridor et dans les pièces où la famille dormait. Le haut de ma garde-robe s’ornait d’un rang d’asparagus. Une fougère se déployait devant le miroir de mon lavabo, m’empêchant de voir si je m’étais bien lavé sur toute la surface du visage, si je n’avais pas laissé des traces de savon derrière mes oreilles, si la raie qui me divisait les cheveux était droite. Sur le plancher s’alignaient plusieurs variétés de cactées. Du sommet d’autres sellettes tombaient des tiges de lierre toujours propre et brillant car ma mère, journellement, nettoyait les feuilles, leur ôtait la poussière. Arrosées chaque matin, les plantes autour de mon lit prospéraient. Certaines fleurissaient. Mais c’est sur le fuchsia que mon âme a préféré se poser. La plante lui paraissait gaie avec ses clochettes pourpres et roses. Elle était aussi la plus rapprochée de mon corps et il lui en coûtait, à mon âme, de s’en séparer après tant d’années d’amour et de disputes, tant de luttes et de réconciliations. Imprudent, ce corps lui avait apporté toutes sortes de frayeurs et parfois le ravissement. "

Conrad Detrez

----- Message d'origine -----
"Je ne me rappelle jamais cette partie de plaisir sans un obscur regret, comme une sorte d'étouffement. Je m'étais fait de ce jour tant de joie à l'avance ! Tout paraissait si parfaitement concerté pour que nous soyons heureux. Et nous l'avons été si peu !...

Que les bords du Cher étaient beaux, pourtant ! Sur la rive où l'on s'arrêta, le coteau venait finir en pente douce et la terre se divisait en petits prés verts, en saulaies séparées par des clôtures, comme autant de jardins minuscules. De l'autre côté de la rivière les bords étaient formés de collines grises, abruptes, rocheuses ; et sur les plus lointaines on découvrait, parmi les sapins, de petits châteaux romantiques avec une tourelle. Au loin, par instants, on entendait aboyer la meute du château de Préveranges.

Nous étions arrivés en ce lieu par un dédale de petits chemins, tantôt hérissés de cailloux blancs, tantôt remplis de sable ― chemins qu'aux abords de la rivière les sources vives transformaient en ruisseaux. Au passage, les branches des groseilliers sauvages nous agrippaient par la manche. Et tantôt nous étions plongés dans la fraîche obscurité des fonds de ravins, tantôt au contraire, les haies interrompues, nous baignions dans la claire lumière de toute la vallée. Au loin sur l'autre rive, quand nous approchâmes, un homme accroché aux rocs, d'un geste lent, tendait des cordes à poissons. Qu'il faisait beau, mon Dieu !"

 

Jilber
France
Posté le:
8/6/2007 01:27
Sujet du message:
Extrait de mon livre préféré...
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Site Internet:
http://jilber.fr
"Je ne me rappelle jamais cette partie de plaisir sans un obscur regret, comme une sorte d'étouffement. Je m'étais fait de ce jour tant de joie à l'avance ! Tout paraissait si parfaitement concerté pour que nous soyons heureux. Et nous l'avons été si peu !...

Que les bords du Cher étaient beaux, pourtant ! Sur la rive où l'on s'arrêta, le coteau venait finir en pente douce et la terre se divisait en petits prés verts, en saulaies séparées par des clôtures, comme autant de jardins minuscules. De l'autre côté de la rivière les bords étaient formés de collines grises, abruptes, rocheuses ; et sur les plus lointaines on découvrait, parmi les sapins, de petits châteaux romantiques avec une tourelle. Au loin, par instants, on entendait aboyer la meute du château de Préveranges.

Nous étions arrivés en ce lieu par un dédale de petits chemins, tantôt hérissés de cailloux blancs, tantôt remplis de sable ― chemins qu'aux abords de la rivière les sources vives transformaient en ruisseaux. Au passage, les branches des groseilliers sauvages nous agrippaient par la manche. Et tantôt nous étions plongés dans la fraîche obscurité des fonds de ravins, tantôt au contraire, les haies interrompues, nous baignions dans la claire lumière de toute la vallée. Au loin sur l'autre rive, quand nous approchâmes, un homme accroché aux rocs, d'un geste lent, tendait des cordes à poissons. Qu'il faisait beau, mon Dieu !"
 

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