Bienvenue sur
le forum de
Mémoires de Siam

Ce forum non modéré est consacré à la culture thaïlandaise,
histoire, géographie, langues, religions, traditions,
politique, sociologie, cinéma, littérature,
musique, théâtre, sport, cuisine, etc.

cet espace est le vôtre
merci pour vos contributions


Obtenez 1000 visiteurs rapidement !
Obtenez 1000 visiteurs rapidement !
Outils webmasters Compteur Chat Forum Sondage Découverte Référeur


M'inscrire M'inscrire Me connecter Me connecter Mot de passe oublié Mot de passe oublié Retour au forum Retour au forum



  Pages: 1
Poster un nouveau message Répondre au message
Auteur Message
   Trier par date croissante
Bernard Suisse
France
Posté le:
20/4/2002 16:47
Sujet du message:
Suriyothai - Les sources historiques
Répondre            
Email:
memoires-de-siam@noos.fr
 
Monsieur Hoang évoquait le manuel publié à l’occasion de la sortie du film Suriyothai et destiné à permettre aux spectateurs de mieux comprendre l’intrigue. Je ne connais pas ce manuel, et je me le procurerai dès que j’irai en Thaïlande. Toutefois, à présent que j’ai fini de transvaser un forum dans l’autre :-), je me suis attaché à rédiger quelques notes à l’usage des spectateurs francophones. Je vous livre ici la première partie de ce (long) travail, qui concerne les sources historiques.

Le problème qui se pose à tous les historiens qui se penchent sur l’histoire du Siam est la validité des sources. On sait que l’invasion birmane de 1767 et la mise à sac d’Ayutthaya ont provoqué la destruction de la quasi-totalité des documents antérieurs.

Les sources siamoises sont essentiellement les Phra Racha Pongsawadan évoqués par Monsieur Hoang. Ces chroniques royales sont des tentatives de reconstitution de l’histoire du Siam. Malheureusement, les auteurs qui les ont compilés ont détruit – où en tout cas n’ont pas préservé – les sources qu’ils utilisaient, si bien qu’il est impossible aujourd’hui de vérifier la véracité de ces travaux.

Deux manuscrits sont conservés à la Bibliothèque Nationale de Bangkok. Le premier remonte à 1783, (règne du roi Taksin), l’autre à 1795 (règne du roi Rama I). Ces deux manuscrits ont été compilés en 1840 par le prince Paramanujit Jinorot sous les instructions du roi Rama III.

Cette compilation, réécrite et remaniée, a donné naissance à deux nouvelles versions : le Phongdsawadan en 2 volumes édité en 1863 par le Dr Bradley, et la « Royal Autograph Edition », révisée par le roi Mongkut (Rama IV) et annoté par le prince Damrong, le père de l’histoire moderne thaïlandaise, et publiée en 1907.

Le problème que rencontrent les historiens lorsqu’ils étudient ces documents, compilations, recompilations de documents de seconde main, est que la quasi-totalité des dates semble fausse, (des différences pouvant aller jusqu’à 20 ans et plus) lorsqu’on les compare entre elles d’une part, et avec les documents occidentaux ou les archives des pays voisins : Chieng Maï, Luang Prabang, Pégou, etc. d’autre part.

Il faut signaler un Pongsawadan ancien retrouvé en 1907, compilé en 1680 sous les ordres du roi Naraï et appelé le Phongsawadan de Luang Praset, du nom de son découvreur. Ce Phongsawadan est considéré comme le plus véridique, et les dates qu’il indique s’accordent généralement avec celles des documents des royaumes étrangers ou occidentaux.

On trouve également des indications dans le Sangitivamsa, un ouvrage religieux écrit en 1789 en pali par un moine bouddhiste, dont il existe une traduction française due à George Coedès.

Il existe encore d’autres sources, notamment sur l’histoire du royaume de Chieng Maï, avec le Phongsawadan Yonok publié en 1907.

En ce qui concerne les historiens siamois modernes, c’est sans aucun doute le prince Damrong qui reste le modèle de référence, et son ouvrage sur les guerres avec les Birmans « Thaï Rop Phama » publié en 1917 (récemment traduit en anglais et réédité par White Lotus) est une mine de renseignements, même si le prince Damrong avouait d’une manière plus poétique que scientifique que, lorsqu’il se trouvait confronté à plusieurs versions d’un même fait, il privélégiait la plus belle et la plus noble…

Pour les sources étrangères, elles sont d’abord portugaises (les Portugais s’installèrent en force dans le royaume dès 1511, année de la prise de Malacca par Albuquerque, vice-roi du Portugal dans les Indes-Orientales). On trouve des renseignements précieux chez Joao de Barros et son ouvrage « Decada Terceira da Asia », chez Fernando Mendez Pinto et ses célèbres « Perenegriçao », de 1614. Plus tard, le Hollandais Jeremias van Vliet publiera – en français – les « Révolutions arrivées dans le Royaume de Siam » (1647). A partir du règne du roi Naraï, l’histoire du Siam nous est tout de même beaucoup mieux connue, grâce aux échanges internationaux et aux nombreuses relations dont nous disposons. La Loubère, le père Tachard, Turpin (qui n’a jamais mis les pieds au Siam, et a effectué une compilation des principales relations jésuites tout en restant très imprécis quant aux dates et aux noms), etc.

Chez les modernes, on signalera le travail de référence de W.A.R. Wood, qui publia en 1924 son History of Siam. Parce qu’il a étudié et comparé de très nombreuses sources, Wood nous fournit un paranoma complet et très solide de l’histoire siamoise depuis les origines jusqu’en 1781. La plupart des faits compilés par Wood sont en conformité avec les travaux des historiens plus modernes, dont David K. Wyatt dans son ouvrage « Thaïland, a short history ».

En ce qui concerne la reine Suriyothai, de quels documents dispose-t-on ? J’aurais envie de dire d’aucun, son nom n’est pas même mentionné dans les Chroniques royales où elle apparaît simplement sous le nom de « la Reine ». Quant au Phra Racha Phongsawadan de Luang Praset, qui paraît-il a servi de source principale au film, il consacre à peine quelques lignes à la souveraine. D’où vient-elle, qui est-elle ? C’est une évidence, historiquement nous n’en savons rien, et seule sa mort est connue avec quelque certitude. C’était une gageure de faire un film de trois heures avec si peu d’éléments, mais l’obscurité même de l’histoire a servi les scénaristes. Tous les évènements politiques ou militaires racontés dans le film sont réels, et sur cette trame historiquement correcte, le destin de la reine Suriyothai vient se superposer d’une façon harmonieuse et plausible. Rien ne nous garantit la véracité des faits racontés, il y a très peu de chance que les choses se soient bien passés ainsi, mais rien ne peut nous prouver qu’ils sont faux.
Le prince Chatrichalerm l’avoue bien volontiers : « En tant que réalisateur, je suis autorisé à me servir de mon imagination davantage que les historiens. C’est un film historique, mais c’est assurément mon interprétation de l’histoire. » Etant donné les très infimes éléments dont il disposait, il valait mieux effectivement, avoir beaucoup d’imagination.

Bien amicalement
-----
Bernard Suisse
 

Poster un nouveau message Répondre au message
  Pages: 1

M'inscrire M'inscrire Me connecter Me connecter Mot de passe oublié Mot de passe oublié Retour au forum Retour au forum




Retour page d'accueil ? Cliquez sur l'éléphant ! Retour page d'accueil