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Mémoires de Siam

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   Trier par date décroissante
Bernard Suisse
France
Posté le:
19/4/2002 22:06
Sujet du message:
De quoi sourire...
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memoires-de-siam@noos.fr
 
Ce texte paru en 1888 dans "La Nouvelle Revue" est signé de Gaston Routier, vice-consul de Siam. Abstraction faite des préjugés raciaux et des réflexions colonialistes propres à l'époque, je le trouve pour ma part assez amusant, et peut-être encore assez actuel :-)

Chronique de Siam – La Siamoise chez elle.

M. Henri Mouhot, explorateur de Siam et du Cambodge, a écrit en parlant de la Siamoise : « La femme, presque toujours bien traitée par son époux, conserve un ascendant non contesté autour du foyer domestique : elle y est honorée et y jouit d’une grande liberté ; loin d’être reléguée dans l’intérieur, comme en Chine, elle se montre en public, va au marché, rend et reçoit des visites, étale à la promenade, en ville, à la campagne, dans les pagodes, les toilettes de luxe, les bijoux dont la surchargent la vanité et l’affection de son mari, et fait bien rarement repentir celui-ci de l’aveugle confiance qu’il lui accorde ».

Tous les voyageurs qui ont visité le royaume de Siam, sont unanimes à faire l’éloge de la femme siamoise. Sans avoir acquis dans la société le rang et l’influence qui appartiennent à la femme dans la société européenne, elle a su cependant se créer par son intelligence une situation très respectée.

Qu’on ne se figure point toutefois qu’elle est, comme en Europe, la compagne et l’égale de l’homme ! Elle occupe au contraire un rang inférieur : elle n’a aucun droit, aucun privilège, elle n’est personne socialement. Ses parents ne la donnent pas en mariage, ils la vendent et s’engagent par une clause, qui se trouve dans tous les contrats, à la rechercher si elle abandonne le foyer conjugal et à la ramener à son mari ou mieux à son acquéreur.

La femme siamoise, comme en tout pays oriental, ne serait donc qu’un objet de luxe, un meuble coûteux ou une bête de somme, si son esprit ne lui avait donné le moyen de se faire aimer, respecter et même craindre de son époux ; en général, elle sait même prendre sur son mari un ascendant qui pourrait passer pour une domination quelque peu tyrannique.

Comme dans tous les pays orientaux, le Siamois a le droit de prendre une ou plusieurs femmes ; mais là comme ailleurs la polygamie est un luxe que les grands seuls peuvent se permettre. L’homme de basse extraction n’a le plus souvent qu’une épouse ; aussi l’empire que la femme exerce sur son mari est-il bien plus appréciable dans la basse classe que chez les grands où règne la polygamie et où la femme, entourée de rivales et d’esclaves, emploie son désœuvrement à des intrigues de sérail qui la compromettent toujours aux yeux de son seigneur et maître.

Ce qui explique surtout l’influence de la Siamoise, c’est l’amour qu’elle a de son intérieur. De toutes les femmes du globe, c’est celle qui comprend le mieux l’économie domestique de sa maison ou plutôt de sa hutte.

La femme à Siam reconnaît et admet parfaitement que l’homme, le mari, est le roi de la création… mais hors de chez lui : qu’il est presque un demi-dieu… mais pas à la maison ; qu’il a un grand rôle à jouer dans l’univers, mais que dans sa hutte ce rôle, par les raisons ci-dessus, doit être tout petit. L’homme étant au dehors l’orgueil de la famille, il doit être modeste chez lui. D’ailleurs la Siamoise est convaincue que si le mari a des mérites c’est que sa femme lui donne de bons conseils et de sages avis. Sur les points ci-dessus toutes les Siamoises sont d’accord. Donc le principe : que la femme doit être maîtresse chez elle, est pour chacune un axiome qu’elles savent faire respecter.

A peine est-il hors de chez lui, que le Siamois est le chef incontesté ; mais dès qu’il rentre, il descend au rang de subordonné ; despote au dehors, il abdique sur le seuil, et à l’intérieur de sa hutte c’est sa femme qui règne en absolue souveraine.

Bangkok, la grande et puissante capitale du Siam, la Venise de l’extrême Orient, est bâtie sur pilotis. Si on remonte le matin, soit le Mé-nam (Mère des eaux), cet immense fleuve qui traverse la cité, soit l’un des mille petits canaux qui sillonnent Bangkok en tous sens, on aperçoit un curieux spectacle.

Nonchalamment étendue sur les radeaux qui supportent leurs huttes de bambous, les femmes fument des cigarettes tandis que leurs maris débarbouillent les enfants, frottent leur corps de safran d’Inde pour les préserver des moustiques qui à Bangkok sont plus que partout ailleurs les cousins de l’homme, c’est-à-dire qu’ils ne les quittent pas même le soir. Les Siamois apprêtent le riz pour le déjeuner du matin. Ces dames fument et rêvent, - elles dédaignent de travailler. C’est là l’ouvrage du mari. Tant qu’il est à la maison c’est lui qui nettoie, qui fait la cuisine, qui soigne les enfants : en un mot il cumule les fonctions de valet de chambre, de cuisinier et de bonne d’enfants.

Le plus original, c’est qu’aucun d’eux ne proteste ; non que les maris redoutent la force physique de leurs femmes, mais ils craignent les querelles, ils n’osent affronter des colères terribles ; ils préfèrent moyennant un léger sacrifice d’amour-propre, conserver la paix dans leur ménage et un doux sourire sur les lèvres de leurs tyrans. Tous se résignent, et l’idée de famille, très développée chez ce peuple, fait que le père trouve à barbouiller et à baigner sa progéniture un délassement à ses travaux et un véritable plaisir.

La femme à Siam est fort gracieuse ; de douze à vingt ans elle est même jolie, et, finesse de traits à part, elle a peu à envier aux beautés européennes. Sa peau légèrement brune a des reflets dorés, et le charme de sa coquette personne est très grand. On la voit au marché, aux promenades, couverte d’autant de belles étoffes et de bijoux que le permettent son rang et sa fortune.

Les Siamoises adorent la parure et le clinquant.

Les jeunes filles portent un léger pagne en soie dont elles se couvrent la gorge : elles en jouent comme une Castillane de son éventail, l’ôtent et le remettent avec des mouvements d’une grâce et d’une coquetterie achevées. En vieillissant, elles enlaidissent : leur passion pour le bétel (mélange de chaux, de noix d’arec et de tabac chinois rouge qu’elles mâchent sans cesse) leur met au coin des lèvres deux ruisseaux d’un brun jaunâtre qui dégouttent sur leur menton et sur leur gorge. Mais jeunes, elles possèdent une séduction extrême qui leur donne un grand empire sur leur mari, et elles savent, avec autant de câlinerie et de rouerie que les Européennes, se poser en victimes à la première infraction de leur époux et lui faire demander bien vite un pardon qu’on finit toujours par leur accorder.

L’empire des femmes est si grand que les Siamois qui sont d’effrénés joueurs n’oseraient pas prendre leur femme comme enjeu : ils craindraient trop de la perdre.

Les Chinois eux-mêmes, qui sont très dédaigneux de leurs femmes et ne se gênent ni pour les battre ni pour les faire travailler, subissent la domination des intelligentes filles de Siam lorsqu’ils les prennent pour épouses. Elles savent inspirer l’amour et l’entretenir savamment. Et non seulement les Chinois, ces joueurs invétérés, ne jouent pas leur femme siamoise, mais encore on raconte qu’ils poussent le dévouement, si elles le désirent, jusqu’à se vendre comme esclaves pour leur donner les moyens d’acheter une plus grande hutte ou de tenter un petit commerce. On a vu des femmes jouer leur mari, mais point de maris jouer leurs femmes.
Une qualité que l’époux siamois reconnaît à l’épouse et qui la grandit à ses yeux, c’est qu’elle possède à un très haut degré la faculté commerciale, ou pour mieux dire du trafic ; elle sait vendre, acheter, revendre, tandis que lui, surtout s’il est de basse extraction, ne sait que jouer ou dormir, et ne vaut que sous la férule de sa femme. La Siamoise, au contraire, se plaît à trafiquer : elle a la compréhension mercantile ; c’est elle qui pêche le poisson dans la rivière et qui le vend ; c’est elle qui achète des barques chargées de fruits et qui les revend avec profit ; c’est elle qui ouvre sur son radeau une petite boutique, qui amasse et met de côté quelques piastres pour sa famille. Son mari ne sait pas et ne veut pas se mêler d’affaires mercantiles ; il a raison, car il y est fort malhabile.

Cette qualité de la femme à Siam, ce goût du négoce est fort apprécié des Chinois qui sont des maîtres dans l’art du commerce et qui en sont presque entièrement les maîtres à Bangkok. Le Siamois arrive tant bien que mal à porter de l’eau, à soigner un cheval, à faire des commissions ; mais il est incapable de s’acquitter d’un travail sérieux, et même comme portefaix, il ne peut être comparé aux coolies chinois qui transportent le charbon, le riz, le bois de teck, etc., et qui servent à charger et à décharger les navires.

J’ai dit que le sentiment ou plutôt l’instinct de la famille est très développé à Siam. La femme y aime beaucoup ses enfants ; elle les caresse, les cajole, les entoure de mille petits soins, les attife avec coquetterie : elle s’en fait gloire.

C’est un véritable bonheur même pour l’Européen de voir ce peuple jeune et intelligent professer tant de respect, de vénération et d’amour pour l’enfance et pour la vieillesse, cette seconde enfance. On sent qu’il y a en lui le germe de toutes les qualités et de toutes les vertus, et que, policé et initié à la civilisation, ce peuple ne tardera pas à devenir l’égal des peuples de notre vieux monde.

La femme a donné à son mari, non seulement le sentiment de la famille, mais la bonté, le goût d’une hospitalité large et généreuse que tous les habitants de ce bau pays s’honorent à pratiquer. C’est la femme qui a doté toute une nation de manières douces et polies ; c’est elle qui par sa douce influence a fait peu à peu abandonner à son époux la barbarie et les instincts sanguinaires. En lui inspirant l’amour de ses enfants et l’attachement à sa personne, elle l’a amené insensiblement à un degré de politesse parfaite et quelquefois exquise.

Pour terminer, j’ajouterai que beaucoup d’Européens à Bangkok ont épouse des Siamoises ; leur charme, leur attrait est aussi puissant sur eux que sur leurs compatriotes. Elles sont aimées et respectées autant qu’une Européenne et savent prendre sur leur mari européen le même empire que sur leur mari siamois ou chinois : ce sont des maîtresses femmes.
 

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